
Sortie d’hiver : optimiser les applications herbicides sur céréales
06 février 2020Avec la forte pluviométrie enregistrée depuis l’automne 2019, les semis de céréales ont pu être échelonnés et les traitements herbicides ont connu quelques perturbations en termes de positionnement et/ou d’efficacité-sélectivité. Le point sur les recommandations de désherbage en sortie d'hiver.
De la phytotoxicité observée, des efficacités globalement correctes
L’arrivée des pluies en octobre a perturbé les semis et, par la force des choses, a permis de mettre en place le levier agronomique « décalage de la date de semis » pour limiter l’infestation en graminées. Les applications d'herbicides racinaires de post-semis/prélevée (pendiméthaline, prosulfocarbe) ont parfois été accompagnées de manque de sélectivité en lien avec les pluies journalières élevées après le traitement et un mauvais enfouissement des semences lié aux conditions de semis difficiles. Résultats : jaunissements, parfois pertes de pieds, mais le temps doux et poussant de l’hiver a permis de limiter les impacts. Pour ceux qui ont pu réaliser les applications aux stades adéquats, les efficacités sont correctes voire bonnes. Pour les applications retardées, sur des vulpins au stade 3 feuilles voire au-delà, les efficacités sont un peu plus aléatoires.
Intervenir en sortie d’hiver avec des produits réservés à l’automne : bonne ou mauvaise idée ?
Pour les parcelles qui n’ont pu être traitées à l’automne et sur des populations d’adventices résistantes aux inhibiteurs de l’ALS ou de l’ACCase, il peut être tentant de réaliser les applications « d’automne » en février. Le tableau 1 reprend des essais dans lesquels des mélanges « costauds » type Fosburi + Daiko ou Fosburi + Défi ou Fosburi + chlortoluron ont été réalisés principalement en janvier, sur des blés au stade 1-2 feuilles. Les résultats montrent que la phytotoxicité peut être présente, mais n’est pas plus élevée qu’à l’automne, du moment que le stade de la culture n’est pas trop avancé (1-2 feuilles maxi pour le blé tendre d’hiver). L’efficacité, dès lors que l’application est réalisée sur adventices jeunes, est proche de celles des applications d’automne.
Tableau 1 : Note de phytotoxicité d’applications herbicides
Attention : certains produits sont soumis à des contraintes réglementaires « calendaires ». C’est le cas par exemple de Fosburi ou de Merkur, qui ont une date limite d’application au 31 décembre.
Dans les parcelles qui n’ont pas pu être désherbées à l’automne et sur des populations d’adventices sensibles, il est préférable de revenir le plus tôt possible en sortie d'hiver avec un produit classique sur ce créneau.
Dans tous les cas, surveiller les parcelles en sortie d’hiver : les conditions de l’automne-hiver doux et humide associées à une dormance élevée des graines de vulpins peut faire craindre des levées échelonnées et potentiellement tardives en saison.
Ne pas hésiter à sortir tôt pour maximiser les efficacités des applications
Le premier facteur de réussite du désherbage est de traiter sur adventices les plus jeunes possibles.
L’humidité du sol (pour les produits inhibiteurs de l’ALS dont les sulfonylurées) et l’hygrométrie (pour les inhibiteurs de l’ALS comme les FOPs et les DEN) sont également déterminantes pour les applications d’herbicides systémiques. Pour les inhibiteurs de l’ALS, une partie du produit pouvant être absorbée par le système racinaire, mieux vaut privilégier des traitements sur sol humide en surface. Pour l’ensemble des antigraminées classiques de sortie d'hiver, une hygrométrie élevée (minimum 60 à 70 %) permettra une meilleure absorption foliaire.
Les températures négatives font souvent craindre pour la sélectivité des applications d’herbicides systémiques en sortie d'hiver. Or, plusieurs essais ont montré que des applications réalisées alors que le thermomètre est aux alentours de 0°C n’engendrent pas de phytotoxicité sur les cultures ; elles s’accompagnent d’une efficacité bien plus élevée comparée au même produit appliqué 1 à 2 mois plus tard, mais sur adventices plus développées et sol parfois plus sec. Bien entendu, cela ne s’applique pas pour des températures très négatives (< -5°C).
Figure 1 : Efficacité des applications d’Atlantis WG et d’Archipel selon le stade et la températures
En conclusion
Mieux vaut anticiper les applications en sortie d'hiver pour viser des adventices jeunes, même si des températures légèrement négatives sont annoncées.
Les adjuvants permettent également d’augmenter l’efficacité des produits, même sur formulation OD. Les essais font état d’un gain moyen de 5-15 points d’efficacité en rajoutant du sulfate d’ammonium et de l’huile au produit phytosanitaire, surtout en conditions difficiles (hygrométrie faible, forte densité de vulpins...). En conditions optimales (météo favorable, faible densité d'adventices), le bénéfice du sulfate d’ammonitrate sera moindre.
Figure 2 : Comparaison d’efficacité des adjuvants avec Actimum sur vulpin – 2 essais 2019
Mélanie FRANCHE (ARVALIS - Institut du végétal)
Philippe HAUPRICH (ARVALIS - Institut du végétal)
Merci de vous identifier pour commenter cet article
aucun commentaire pour l'instant