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Indicateurs de qualité - Maïs fourrage : savoir lire son bulletin d’analyses

Tous les maïs fourrages ne se ressemblent pas. Il existe des différences significatives de composition chimique et de valeurs alimentaires, qui influencent les performances animales. Il est donc nécessaire de faire analyser son fourrage à la récolte pour ajuster la complémentation des rations.

Maïs fourrage : comment interpréter un bulletin d'analyse

Le bulletin d’analyses contient des données mesurées et d’autres calculées établies à partir, entre autres, de modèles construits suite à des essais sur animaux.

Les valeurs mesurées concernent surtout la composition chimique du fourrage (teneurs en amidon, cellulose brute, matières azotées totales...) ainsi que sa digestibilité enzymatique. Ces mesures permettent de positionner les fourrages analysés par rapport à un référentiel (tables Inrae, campagnes précédentes) et servent notamment à évaluer le fonctionnement du rumen (« gaspillage », risque d’acidose…).

Les valeurs calculées à partir de ces données informent sur la valeur alimentaire du fourrage, et en particulier ses valeurs énergétique (UFL et UFV), azotée (PDIA, PDIN et PDIE) et d’encombrement (UEL et UEB).

32-33 % de MS dans la plante entière

Première donnée généralement mesurée : la teneur en matière sèche (% MS). Ce critère permet de transformer les pesées du produit brut en rendement, stocks ou quantités distribuées. La récolte se fait généralement entre 30 et 35 % de MS plante entière, le compromis idéal entre rendement, digestibilité des fibres et qualité de conservation étant aux environs de 32-33 % MS. Une récolte trop précoce ne permettra pas d’optimiser le rendement, le fourrage sera sujet à des pertes par écoulement de jus et sera moins ingestible. Un maïs récolté trop tard sera plus difficile à tasser et la qualité de conservation compromise.

La matière sèche se décompose en matières organiques et minérales (ou cendres). Le taux de matières minérales moyen est de l’ordre de 4 % MS. S'il dépasse 6 % MS, c'est le signe d’une contamination de terre (boue, poussières) lors de la récolte, induisant un risque de prolifération des bactéries butyriques et la dilution de la valeur alimentaire du maïs.

6 à 8 % de MAT

La connaissance des matières azotées totales (MAT) ou protéines « brutes », relativement faibles dans le maïs (6 à 8 % de la MS), est nécessaire pour le calcul des valeurs PDI permettant de déterminer l’équilibre azoté de la ration des ruminants. La teneur en MAT diminue par effet de dilution quand le rendement de la culture augmente.

Une fertilisation sous-estimée, des conditions estivales peu favorables à la minéralisation de l’azote du sol ou un mauvais enracinement peuvent pénaliser l’absorption de l’azote par la plante et expliquer des teneurs en MAT trop faibles. A l'inverse, des conditions favorables à la minéralisation au printemps, voire une sur-fertilisation azotée, sont à l'origine de valeur supérieures à 8 % MS.

Constituants directement issus de la photo-synthèse, les glucides solubles (GLS) sont nécessaires au processus de fermentation du fourrage. Leur teneur diminue avec la maturité du maïs. En vert (à la récolte), la teneur en sucres solubles doit être au moins égale à 6 % de la MS afin de fournir suffisamment de substrat aux micro-organismes responsables de l’acidification. Un chiffre plus faible témoigne d’un stade de récolte trop tardif ou d’un problème sur l’échantillon (chaîne du froid mal assurée, ou séchage trop lent…).

Des teneurs en amidon très variables

En ce qui concerne l’amidon, forme ultime de stockage des glucides dans le grain, la plante entière en contient en moyenne 31 % de la matière sèche, ce chiffre variant de 0 à plus de 40 % selon les conditions climatiques de la campagne. En conditions favorables à la mise en place d’un nombre élevé de grains et à un bon remplissage, la teneur en amidon pourra être très élevée (> 40 % MS), d’autant plus si le stade de récolte est tardif. A l’inverse, en cas de stress hydrique très marqué autour de la floraison, la production de grains et donc d’amidon peut être fortement réduite.

La teneur en amidon dans la plante augmente avec la maturité du maïs mais sa digestibilité diminue. Il est conseillé de ne pas dépasser 25 % d’amidon (en MS) dans la ration d’une vache laitière pour limiter le risque de maladies métaboliques (acidose subclinique…) et le gaspillage énergétique (interactions digestives). Des maïs riches en amidon, fruits d’une récolte tardive et/ou de conditions exceptionnelles de végétation, nécessitent donc une complémentation adaptée (dilution de la teneur en amidon de la ration par des fourrages prairiaux, coproduits…).

La digestibilité des fibres diminue avec le stade de récolte

La teneur en fibres est mesurée de différentes manières : cellulose brute (CB), NDF. Elle est inversement proportionnelle à la part de grains. La digestibilité de l’appareil végétatif se dégrade avec la maturité de la plante. Entre 33 et 38 % MS, la digestibilité du NDF (dNDF) baisse de 4 points, ce qui équivaut à une perte d’environ 0,4 litre de lait par vache et par jour pour une ration composée de 45 % de maïs fourrage. Il faut viser un minimum de 17-18 % de CB (en MS) dans les rations, dont 75 % apporté par les fourrages.

La digestibilité enzymatique de la MS (DCS ou méthode « Aufrère ») est une mesure in vitro utilisée pour estimer la digestibilité de la matière organique (dMO) du fourrage par l’animal. Une DMO supérieure à 73 % MS témoigne d’une teneur en amidon élevée et/ou des fibres très digestibles (dans le cas de récolte précoce). A l’inverse, en-deçà de 70 %, la DMO révèle une teneur en fibres élevée et/ou une récolte trop tardive.

Des données nutritionnelles

Le bulletin d’analyses fournit également des données calculées, d’ordre nutritionnel.

La prédiction de la valeur énergétique (Unités Fourragères lait ou viande UFL ou UFV) permet de comparer l’échantillon analysé à ceux obtenus dans des conditions comparables de climat ou de stade de récolte. Plus l’écart à la normale est élevé (stades tardifs, climat très sec, très chaud… ou très froid), plus cette valeur doit être validée à l’étable par le comportement des animaux. La valeur énergétique est en effet très influencée par les conditions de végétation et le stade de récolte.

En moyenne décennale, la valeur énergétique du maïs fourrage se situe autour de 0,91-0,92 UFL/kg MS. Les deux composantes majeures de l’énergie du maïs fourrage sont la teneur en amidon et la digestibilité de la partie « tige+feuilles ». Ainsi, pour une même valeur UF, des maïs peuvent présenter des profils très différents selon leur teneur en amidon et leur niveau de digestibilité des fibres. La connaissance de la valeur UFL et du profil du maïs (type amidon, fibre ou équilibré) permet d’ajuster le niveau et le type de complémentation énergétique. L’objectif de rationnement pour une vache laitière se situe autour de 0,90 UFL/kg MS, sans dépasser 25 % d’amidon (en MS) dans la ration.

Le calcul de la valeur azotée (PDIA, PDIE, PDIN) traduit pour sa part essentiellement les variations de teneur en MAT (dans le cas des PDIN et des PDIA) ainsi que de la digestibilité (PDIE). Cependant, la valeur azotée réelle peut être inférieure aux valeurs calculées. C’est le cas aux stades précoces, quand les protéines se dégradent plus au silo et dans le rumen. C’est aussi le cas des stades tardifs, quand une partie de l’amidon est trop vitreuse et ne participe pas à l’élaboration des protéines microbiennes. 

Les teneurs moyennes en PDIA, PDIN et PDIE sont respectivement de l’ordre de 16, 44 et 69 g/kg MS. La connaissance des valeurs PDI est nécessaire pour ajuster le niveau de complémentation azotée et le profil de protéines à apporter. L’objectif de rationnement pour une vache laitière se situe autour de 100 g PDIE/UFL.

Une méthode de laboratoire pour évaluer l’éclatement des grains

Les valeurs alimentaires ne prennent pas encore en compte tous les paramètres. Par exemple, l’éclatement du grain et la taille des particules ne sont actuellement pas utilisés pour affiner la valeur du maïs fourrage. Il existe une méthode permettant d’estimer le niveau d’éclatement du grain du maïs : la méthode du CSPS (Corn Silage Processing Score), accessible dans plusieurs laboratoires français depuis 2018. Un niveau de CSPS inférieur à 50 indique un éclatement insuffisant ; entre 50 et 70, l’éclatement est correct ; au-delà de 70, l’éclatement est optimal. Il conviendra donc de minimiser les valeurs UFL et PDIE d’un maïs présentant un CSPS faible, d’autant plus que ce maïs sera distribué aux animaux après une durée de conservation courte.

Tableau 1 : Valeurs repères et interprétations des résultats d’analyse de composition chimique du maïs fourrage (exprimées en % de la matière sèche sauf pour le CSPS)

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