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Sécheresse 2019 - Miser sur les dérobées pour compléter ses stocks fourragers

Avec la sécheresse persistante dans de nombreuses régions, les éleveurs ont commencé à entamer les stocks de fourrage pour l’alimentation des animaux. Les cultures en dérobée à l’interculture représentent des ressources possibles. Réussir l’implantation nécessite un minimum de précautions. De plus, il faut aussi compter sur un minimum de pluie.

Utiliser les cultures dérobées comme fourrage en 2019

La date de semis dépend de la composition du couvert

Beaucoup d’espèces sont adaptées à un semis de fin août - début septembre (tableau 1). Cette période permet de réaliser au préalable des faux-semis qui contribueront à la réduction du stock de graines d’adventices sur la parcelle, détruire les repousses de céréales voire également à la lutte contre certains ravageurs (limaces, taupins, zabres…). De plus, à cette période, la plus forte probabilité de retour des pluies réduit les risques d’échec à l’implantation.

Une implantation plus précoce, fin juillet - début août, limite les possibilités de déchaumage et peut être plus risquée pour la réussite de l’implantation si aucune pluie n’est observée dans les semaines suivant le semis. Par contre, c’est le créneau à saisir dans le cas d’une interculture courte, entre deux cultures de céréales.

Tableau 1 : Adaptation des différentes espèces de cultures en dérobée aux dates de semis

Quelques espèces, comme le moha (gélif) ou les trèfles, doivent être semées plutôt avant mi-août, si l’on veut obtenir un développement satisfaisant avant l’hiver, du fait de leurs besoins élevés en température et lumière. Les autres légumineuses (lentille fourragère, vesce pourpre, féverole, pois fourrager) montrent de bonnes vigueurs au démarrage, avec de bonnes implantations en semis de fin août - début septembre.

Au-delà de mi-septembre, privilégier les graminées (ray-grass d’Italie, céréales) ou la navette qui peuvent se développer suffisamment et supporter les gelées d’automne.

Les mélanges graminées-légumineuses présentent en général de meilleurs rendements que des espèces implantées seules, mais ces associations représentent un coût de semences plus élevé.

Il est possible de croiser les solutions, et ainsi s’adapter aux conditions estivales à venir, tout en restant attentif aux coûts d’implantation. Des mélanges ray-grass d’Italie (RGI) + céréales (type avoine) peuvent aussi être envisagés pour une fauche précoce cet automne, et le maintien du RGI jusqu’au printemps.

Les mélanges d’espèces sont bien valorisés par les animaux

Pour la valorisation en fourrage, les couverts semés en août et exploités en novembre présentent des valeurs nutritives élevées lorsqu’ils sont exploités avant les stades floraison ou épiaison, dépassant 0,75 UFL de teneur en énergie et 100 g/kg de matière sèche de valeur PDIN (source ARVALIS La Jaillière).

Certaines espèces, comme le trèfle incarnat, la vesce commune d’hiver, le colza ou encore le ray-grass d’Italie présentent des valeurs nutritives élevées. Les légumineuses apportent des PDI alors que les crucifères exploitées avant floraison offrent un bon équilibre UF/PDI mais à distribuer en quantité limitée dans la ration des bovins : pâturage au fil, affouragement en vert. De manière générale, les crucifères sont peu adaptées à la récolte du fait d’une difficulté à préfaner suffisamment. Les complémentarités de valeurs nutritives entre familles botaniques renforcent l’intérêt des mélanges d’espèces en dérobés.

Chaque éleveur fera son choix en fonction de ses contraintes pédo-climatiques, des fourrages nécessaires sur l’exploitation, et des coûts liés à l’achat de semences. Il peut être judicieux de répartir les risques sur l’exploitation en implantant des couverts de différentes natures.

Pour optimiser le choix d’espèces (en pur ou en mélange) adaptées au contexte de l’exploitation et à une valorisation fourragère, techniques d’implantation (date de semis par région, dose et densité de semis, coût semences, matériel adapté), consultez :

L’implantation, une étape décisive

La plupart des dérobées sont des petites graines qui nécessitent une attention particulière pour réussir l’implantation. Sauf s’il existe un risque de rémanence d’herbicide (voir tableau 3), il faut privilégier le non labour (travail superficiel, avec le matériel disponible sur l’exploitation), voire le semis direct afin d’éviter le dessèchement du profil de sol. L’exportation des pailles facilitera la préparation du lit de semences.

L’idéal est de semer juste avant une pluie, voire juste après, sur sol encore frais. On considère qu’il faut un minimum de 10 à 20 mm pour assurer une levée régulière et homogène. Le rappui du lit de semences, pour améliorer le contact sol – graine, est obligatoire à cette saison (éléments de rappui, roulage). Dans le cas d’un faux semis préalable, le semis sera réalisé quelques jours après ce premier passage, par exemple avec une herse rotative combinée au semoir, qui permettra de détruire les repousses.

Adapter la profondeur de semis à la taille des graines

La profondeur optimale de semis dépend de la taille des graines. Les petites graines se satisfont d’un semis à la volée, en particulier celles qui valorisent la pluie même en étant peu enterrées comme la plupart des crucifères. Attention, certaines graines ne sont pas adaptées au semis au centrifuge en grande largeur en raison de leur petite taille et/ou de faible densité (ray-grass, niger, phacélie, moutarde brune et trèfles).

Les plus grosses graines (céréales, certaines légumineuses comme les vesces et la lentille) nécessitent d’être suffisamment enterrées (2-3 cm) et rappuyées. Le semis en combiné avec une herse rotative + semoir est coûteux mais convient à tout type de graines. La herse permet de détruire une bonne partie des repousses levées.

Quelle fertilisation ?

Selon les régions (voir réglementation : directive nitrates régionale, GREN), des apports modérés d’azote peuvent être autorisés au semis. En absence d’apport, la croissance du couvert et sa production finale seront dépendantes des reliquats restant après récolte et de la minéralisation automnale, plus ou moins importante selon les conditions climatiques.

A noter que l’exploitation des couverts (notamment en fauche) va générer des exportations importantes de potasse. Il conviendra d’en tenir compte pour la fertilisation de la culture suivante, le plus souvent un maïs fourrage, culture également fortement exportatrice.

Pas de désherbage

La réglementation (directive nitrates) interdit toute intervention avec un produit phytosanitaire sur les couverts d’interculture. De toute façon, il faut limiter le coût d’implantation et compter sur le pouvoir couvrant des espèces semées pour leur compétition vis-à-vis des adventices. Le risque de salissement est par ailleurs maîtrisé par l’exploitation qui sera faite du couvert. Le pâturage ou la fauche limitera les montées à graines.

Attention aux herbicides utilisés sur la culture précédente

Il convient d’être très prudent sur les possibilités de semis de couverts après céréales. Certains produits contiennent des matières actives dont la rémanence peut s’étendre sur plusieurs mois et engendrer des phytotoxicités. Le tableau 3 indique de façon non exhaustive les possibilités ou restrictions après céréales:

Tableau 3 : Possibilités de semis après application d’herbicides sur céréales

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