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Désherbage des grandes cultures : les bas volumes sont possibles mais les réductions de dose risquées

ARVALIS – Institut du végétal a travaillé sur de nombreux essais afin de repérer d’éventuelles interactions entre réduction de volume et réduction de dose en matière d’herbicides. Mais gagner sur ces deux tableaux n’a pu s’observer que pour le glyphosate. Pour d’autres produits comme les sulfonylurées ou les herbicides de contact, même si la réduction de volume est envisageable, les réductions de doses sont à surveiller.

Désherbage à bas volume : réduire sans faillir

Glyphosate : un herbicide plus efficace à bas volume

L’institut a mené une expérimentation en 2006 en partenariat avec Monsanto sur le glyphosate appliqué à différents volumes sur des repousses de colza. Il en ressort que plus le volume de bouillie est faible, plus l’herbicide est efficace (figure 1).

Figure 1 : Efficacité du glyphosate en fonction du volume de bouillie par hectare

Seules les modalités présentant des lettres différentes sont significativement différentes entre elles. Etude statistique à l’aide d’un test de Newman-Keuls à 5 %.

Plusieurs raisons expliquent ce phénomène. La première réfère à la qualité de l’eau : le glyphosate est sensible à sa dureté (déterminée par sa teneur en Ca2+ et Mg2+ notamment). En présence de ces ions, l’herbicide, chargé négativement se complexe et pénètre moins bien dans la plante. Ainsi, pour une dose fixe de glyphosate, plus le volume par hectare est faible, moins la présence de calcium est problématique.

La deuxième raison est en rapport avec la formulation du produit qui est soluble dans l’eau (SL). Le glyphosate présente peu d’affinité avec la cuticule des plantes : plus la molécule est concentrée dans les gouttelettes, plus elle pénètre en quantité. On parle de pénétration par gradient de concentration.

Les sulfonylurées acceptent les bas volumes

Entre 2004 et 2012, l’institut a par ailleurs étudié le comportement d’Archipel et d’Alister, deux antigraminées de la famille des sulfonylurées. Ces herbicides ont été évalués à deux doses (une dose « normale » et une dose « réduite », correspondant à 3/5 de la dose « normale ») apportées avec des volumes de bouillies différents (150 l/ha, 65 l/ha et 30 l/ha).

Quel que soit le volume de bouillie à l’hectare, ces sulfonylurées appliquées à la dose « normale » sont significativement plus efficaces qu’à dose « réduite » (figure 2).

En situation de dose réduite, une tendance non significative laisse paraître une augmentation d’efficacité en bas volume. Mais attention, la variabilité est aussi plus importante à dose « réduite » qu’à dose « normale », où la prise de risque est plus faible. Au final, la réduction de volume est envisageable avec les sulfonylurées, alors que celles des doses est limitée notamment sur graminées. Sur ces dernières, sur lesquelles les problèmes d’apparition de résistance se multiplient, il est primordial d’utiliser les doses efficaces recommandées pour ces produits.

Figure 2 : Efficacité d’Archipel appliqué à deux doses (N et 3/5 N) en fonction de différents volumes de bouillie

Synthèse de 9 essais ARVALIS - Institut du végétal réalisés entre 2004 et 2012 à Estrées-Mons (80) et Boigneville (91).

Les herbicides de contact sensibles à une baisse de volume et de dose

Les herbicides de contact sont plus sensibles à la qualité de couverture que les produits systémiques, puisqu’ils agissent là où ils tombent. Ainsi, le volume de bouillie est un élément déterminant dans leur efficacité. Dans trois essais réalisés en partenariat avec l’Institut Technique de la Betterave, un programme de postlevée appliqué à 80 l/ha est significativement moins efficace que 150 l/ha quelle que soit la dose. Avec ce type d’herbicides, la réduction de volume à l’hectare semble difficile.

Figure 3 : Efficacités de désherbage en betterave selon différents volumes de bouillie et différentes doses

Synthèse de 3 essais ITB/ARVALIS - Institut du végétal réalisés entre 2005 et 2008. Seules les modalités présentant des lettres différentes sont significativement différentes entre elles (tests statistiques réalisés à l’aide d’un test de Newman-Keuls à 5 %).

Herbicides racinaires : plus sensibles aux caractères du sol qu’au volume de bouillie

Quant aux herbicides racinaires, ils ne sont pas sensibles au volume de bouillie et peuvent être utilisés avec des volumes pouvant descendre jusqu’à 30 l/ha en bonnes conditions.

En revanche, ces herbicides sont sensibles à l’humidité présente dans le sol. C’est elle qui permet une répartition homogène du produit car, seule la forme dissoute dans l’eau du sol est absorbée par les racines des adventices ou les graines en germination. Ainsi, bon nombre de personnes sont tentées d’augmenter les volumes à l’hectare si le sol est sec. Or, ce n’est pas les dizaines de litres d’eau supplémentaires qui vont rendre le produit plus efficace. Mieux vaut différer l’intervention de quelques jours en se rapprochant des épisodes pluvieux plutôt que d’intervenir sur sol sec. Mais ce n’est pas la seule condition. Les teneurs en argiles et en matières organiques doivent également être prises en compte dans l’efficacité de ces produits : plus ces teneurs sont élevées, plus la quantité de produit « capturée » par le complexe argilo-humique, et donc inutilisable, est importante. Ainsi, en sol argileux, mieux vaut ne pas réduire les doses car toute la quantité apportée est nécessaire, une partie étant déjà bloquée dans les feuillets d’argile. A l’inverse, en sol sableux, des modulations de doses sont justifiées pour ne pas risquer une phytotoxicité prononcée sur la culture.

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